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Le rôle du cerveau dans le travail de collecte de fonds - 4 biais cognitifs et comment les surmonter

Le rôle du cerveau dans le travail de collecte de fonds - 4 biais cognitifs et comment les surmonter

Fundraisers in thought
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Toute ma carrière a été consacrée au travail de collecte de fonds, un travail que j’adore. Mais chaque fois que je me présente comme collectrice de fonds, je reçois le même genre de réaction :

« Wow! Ça doit être vraiment difficile. Je ne pourrais jamais faire ce travail. »

« Ça prend une certaine personnalité pour travailler dans le secteur des OBNL. » 

Et la pire : « Je n’ai pas d’argent, désolé. » (Comme si je demandais de l’argent à toute personne que je croise dans la rue!)

La collecte de fonds est le mouton noir des activités dans notre secteur : la plupart des gens y arrivent à contrecœur, certains finissent par aimer, mais la majorité d’entre eux ne changent pas d’avis. Ces « collecteurs.trices de fonds réticent.e.s » trouvent toujours des raisons pour se concentrer sur d’autres tâches et remettre le travail de financement aux calendes grecques.

Et si on s’arrêtait un moment pour réfléchir à ce qui explique l’hésitation à faire de la collecte de fonds? Et si on parvenait à savoir pourquoi ce travail donne tant de fil à retordre aux gens et à y remédier? Imaginons tout le potentiel qui serait alors libéré au bénéfice de nos missions!

Aussi simple que ça?

Les conseils en collecte de fonds visent presque exclusivement l’aspect tactique - faites ceci, demandez cela. Ces conseils ont l’air tout simples, et souvent, ils sont facilement applicables. Mais alors pourquoi tant de collecteurs.trices de fonds réticent.e.s peinent-ils à les suivre?

La réponse, à la fois simple et complexe, se trouve dans notre cerveau.

Résistant aux changements

Notre cerveau utilise des raccourcis, ou des voies neuronales, pour simplifier des décisions complexes. Ainsi, ces décisions sont prises plus rapidement avec moins d’efforts, permettant au cerveau de conserver son énergie pour des choses plus importantes. Ces raccourcis se développent à force de répétitions qui deviennent des habitudes. Génial, n’est-ce pas! En même temps, cela explique pourquoi il est long et ardu de changer nos habitudes et nos comportements.

C’est d’autant plus difficile parce que nos raccourcis sont tellement incrustés que nous ne réalisons pas que notre cerveau déforme, ou filtre, nos expériences quotidiennes. Ces raccourcis sont le résultat de deux principales influences, soit la répétition et la survie, et ils tendent à suivre certains schémas appelés biais, ou l’euristique.

Alors, comment cela se manifeste-t-il dans le contexte de la collecte de fonds?

Biais de négativité

Un schéma que l’on retrouve régulièrement dans notre réseau neuronal est celui de l’exagération de nos expériences négatives et de la sous-estimation des expériences positives. Nous, les humains, avons tendance à ne voir que le négatif qui est alors amplifié. Prenons comme exemple un courriel envoyé à toutes les personnes sur votre liste de diffusion. Une de ces personnes vous répond « vous m’envoyez trop de courriels. » En même temps, en réaction à ce courriel, 100 personnes font un don. C’est un résultat incroyablement positif! Cependant, votre cerveau va faire une fixation sur l’unique commentaire négatif qui prendra une ampleur bien plus grande que votre succès. Vous commencez alors à douter de vous : « devrais-je faire moins de demandes? », « Est-ce que j’envoie trop de courriels? », « Ah non, les gens commenceront à se désabonner de notre liste. » Vous avez peut-être réussi à collecter 1 000 $, mais la seule chose que vous retenez, c’est l’unique réponse négative. Vous connaissez?

Biais de confirmation

Par biais de confirmation, on entend notre tendance à exagérer l’importance de toute information qui confirme nos convictions. Ainsi, si quelqu’un dit « je ne suis pas une bonne collectrice de fonds », le cerveau de cette personne cherchera à confirmer cette conviction et ignorera toute information contraire. J’ai vérifié les activités de financement d’organismes convaincus de faire un mauvais travail de collecte de fonds, mais ce n’est pas du tout ce que les chiffres me disaient. Objectivement, leur succès ne faisait aucun doute, mais parce que leurs cerveaux étaient conditionnés à confirmer leur conviction, ils déformaient les données et ne voyaient que l’échec et la confirmation de leur argument voulant qu’ils étaient de mauvais collecteurs de fonds. 

Biais du statu quo

Le biais du statu quo nous amène à continuer à faire les choses comme elles ont toujours été faites ou à maintenir une décision prise antérieurement parce qu’il paraît moins risqué de le faire. Nous agissons de la sorte MÊME SI le coût du changement est petit et l’avantage et le bénéfice de ce changement sont grands. C’est ce que j’observe souvent dans les organismes : ils choisissent de continuer à organiser un événement de collecte de fonds qui ne leur rapporte rien au lieu de rediriger le temps et l’énergie investis dans cet événement vers une stratégie plus efficace. Ou ils continuent à mettre leur temps dans des tâches administratives qu’ils pourraient automatiser facilement, parce qu’ils n’aiment pas investir dans la technologie ou changer leurs systèmes et leurs processus. Même si l’option technologique est BEAUCOUP moins chère que le temps requis pour faire le travail manuellement, elle est considérée comme un coût supplémentaire. Et même si on prenait le temps de cette personne et la faisait faire de la programmation ou de la collecte de fonds ou toute autre activité qui contribue plus directement à la mission de l’organisme, on continuerait à résister.  

La séquence inconsciente des événements

Tous nos comportements sont déterminés par ces raccourcis dans notre cerveau. Maintenant, voyons ce qui se passe si nous décortiquons la séquence de ces raccourcis :

Circonstances → convictions → émotions → actions → résultats

Pour illustrer cette séquence, voici un exemple que je rencontre tout le temps. Je recommande toujours à mon vis-à-vis d’organiser une rencontre avec ses donateurs.trices ou supporteurs.trices (individus, entreprises, fondations) afin de mieux les connaître et de savoir pourquoi ils.elles soutiennent l’organisation. Ces rencontres ne servent pas à leur demander quoi que ce soit, mais seulement à écouter et à apprendre. Peu importe le nombre de fois que je réitère ce conseil, la plupart des collecteurs.trices de fonds réticent.e.s ne le suivront jamais. Ils.elles n’enverront jamais ce courriel et ne prendront jamais le téléphone. Voyons la séquence d’événements susceptible de se produire :

Circonstance : Vous apprenez que, selon toute évidence, l’une des choses les plus efficaces à faire en collecte de fonds (surtout celle axée sur une mission) est d’apprendre à connaître vos supporteurs.trices.

Conviction : Votre cerveau met les freins : je crois que je n’ai pas l’expérience nécessaire ou que je ne connais pas la « bonne » façon de gérer ces rencontres. Je crois que je ne peux pas être moi-même et que je dois me présenter d’une manière que je trouve inconfortable et qui n’est pas fidèle à ma personne.

Émotions : Je suis nerveux.se, anxieux.se et je me sens comme un.e imposteur.trice. Je mets en question mes qualités de leaders et doute que je sois la bonne personne pour faire de la collecte de fonds.

Actions : Je ne fais rien. Je me concentre sur d’autres tâches avec lesquelles je suis plus à l’aise.

Résultats : Je n’apprends rien sur nos donateurs.trices. Par conséquent, je ne pourrai pas créer des demandes de don personnalisées, nos collectes de fonds ne seront pas aussi efficaces qu’elles ne pourraient l’être et nous ne recueillerons pas autant d’argent que nous pourrions recueillir autrement.

Changer nos raccourcis pour réussir en collecte de fonds

Il semble évident que pour remplacer ces raccourcis par d’autres, plus productifs au chapitre des collectes de fonds, il faut créer de nouveaux raccourcis plus dominants. Souvenez-vous que les raccourcis sont le résultat de répétitions. C’est pourquoi je vous invite à développer de nouvelles habitudes qui vous aideront à passer à l’action et, par le fait même, à créer de nouvelles voies neuronales. Essayez d’aller au fond de vos raccourcis existants (Faites la séquence des événements!), puis choisissez une habitude que vous pourriez développer pour commencer à créer de nouvelles connexions neuronales pour vos convictions sur les collectes de fonds. 

Pour vous aider à amorcer votre réflexion, je vous propose quatre exercices tout simples à pratiquer tous les jours pour développer des habitudes de collecte de fonds productives. 

Chaque jour, prévoyez 30 minutes dans votre horaire pour les activités suivantes :

 Faites de la visualisation et tenez un journal – 5 minutes

  • Votre cerveau ne fait pas la différence entre une expérience réelle et la visualisation d’une telle expérience. Exercez-vous à visualiser une nouvelle habitude relative aux collectes de fonds que vous voulez développer.

Répétez votre histoire –  5 minutes 

  • Trop souvent, nous pensons à la collecte de fonds comme un argumentaire de vente. En réalité, c’est avec des histoires qu’on peut créer les plus beaux liens avec notre auditoire. Répétez votre histoire et celle de votre organisation jusqu’à ce que vous soyez à l’aise de la raconter en toute confiance.

Organisez des rencontres avec vos donateurs.trices – 10 minutes

  • C’est en allant à la rencontre de vos donateurs.trices que vous comprendrez avec qui vous essayez de créer des liens, que ce soit dans des réunions bilatérales ou par courriel envoyé à un groupe de personnes. Ces rencontres sont l’ingrédient secret de mon travail comme collectrice de fonds, et je vous encourage à prendre 10 minutes tous les jours pour en organiser.

Soignez les relations avec vos donateurs.trices – 10 minutes

  • Il est important de soigner les relations avec vos donateurs.trices existant.e.s. Rien ne sert à chercher de nouveaux.elles contributeurs.trices si vous ne prenez pas l’habitude d’offrir à vos donateurs.trices existant.e.s des raisons pour maintenir leurs contributions à votre cause.

 
Nos auteurs et autrices invité.e.s s’expriment à titre personnel. Leurs opinions ne reflètent pas nécessairement celles d’Imagine Canada.

Cindy Wagman est présidente fondatrice de The Good Partnership,  une entreprise de conseil axée sur les valeurs et éclairée par la justice sociale qui s’efforce de débloquer le potentiel des petits organismes caritatifs par la collecte des fonds. Cindy est devenue collectrice de fonds certifiée en 2009 et a obtenu sa maîtrise en administration des affaires à la Rotman School de l’Université de Toronto en 2013. Elle a effectué des présentations pour l’AFP (Association of Fundraising Professionals), CanaDon, CharityVillage, Bloomerang, Keela et Fundraising Everywhere. Elle est l’animatrice du podcast The Small Nonprofit, le numéro un des balados pour les organismes caritatifs au Canada, et l’auteure de Raise It! The Reluctant Fundraiser’s Guide to Raising Money Without Selling Your Soul.

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