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Attentes du secteur envers une place au gouvernement : autorité, équité, longévité et politiques publiques

Attentes du secteur envers une place au gouvernement : autorité, équité, longévité et politiques publiques

Image of woman talking in a microphone, in a room full of women who work in high tech as consultants in the US. They are the best and brightest from universities in India.
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Insécurité alimentaire, éducation et changement climatique, voilà trois sujets d’ordre social pour lesquels le secteur de la bienfaisance et à but non lucratif (secteur des OBNL) du Canada offre du soutien et des services. Pourtant, ce secteur ne peut compter sur aucune entité le représentant au sein du gouvernement fédéral. C’est pourquoi l’une des priorités stratégiques d’Imagine Canada consiste à travailler avec les organismes, les élu.e.s et les fonctionnaires pour créer une place pour le secteur au gouvernement.  

Dans un esprit d’apprentissage mutuel, nous avons discuté avec diverses parties prenantes de tout le pays pendant la période estivale afin de connaître leur point de vue sur la question d’une place au gouvernement pour le secteur. Ce que nous avons appris souligne l’importance de veiller à l’inclusion et à la participation d’organismes de tout le secteur lorsque viendra le temps de déterminer le mandat et la structure d’une éventuelle entité au sein du gouvernement. Dans ce billet, nous présentons les principaux points retenus de nos discussions avec des OBNL et organismes de bienfaisance de différents sous-secteurs. Nous pensons que leurs perspectives sont indispensables et nous aideront à poursuivre notre travail dans ce dossier sur le plan des politiques, de la recherche et du plaidoyer.

À présent, la relation qu’un organisme maintient avec le gouvernement fédéral dépend entièrement de ses capacités et ressources. Par conséquent, la voix d’organismes de petite taille ou en quête d’équité risque d’être écartée.

Actuellement, la relation que les organismes du secteur entretiennent avec le gouvernement semble de nature ad hoc et motivée par leur mission première. On compte plusieurs ministères, bureaux et agences qui offrent des services aux OBNL laissant ces derniers dans une certaine confusion quant au destinataire approprié de leurs quêtes de soutien ou questions. En l’absence d’un ministère responsable, les organismes ayant le temps, les ressources et les liens nécessaires sont souvent les seuls à pouvoir créer des relations productives avec le gouvernement fédéral. Selon Robyn Hoogendam et Lise Martin d’Hébergement Femmes Canada, souvent, le gouvernement finance et sollicite seulement les organismes [de grande taille] qui connaissent le « jargon gouvernemental ». Il en résulte, au sein de l’appareil gouvernemental, un manque de connaissances des compétences et de l’expertise offertes par les organismes de petite et de moyenne taille.

Les grands organismes sont plus susceptibles d’avoir les moyens de prioriser et de financer leurs propres équipes de relations gouvernementales. Dans les petites organisations, il est plus probable que les ressources suffisent tout juste au maintien des activités quotidiennes. Ce sont souvent les groupes en quête d’équité, comme les organismes dirigés par des personnes noires et offrant des services aux communautés noires, qui subissent un sous-financement chronique et, par conséquent, manquent de capacités pour faire des relations gouvernementales une priorité.
 
La situation actuelle fait en sorte que les relations du secteur avec le gouvernement fédéral restent en grande partie entre les mains de grands organismes nationaux, bien financés et dirigés par des personnes blanches. En parallèle, l’expertise et l’expérience de petits organismes communautaires ne sont pas mises à profit. Idéalement, une place pour le secteur au gouvernement permettrait d’exploiter davantage le potentiel de ces petits organismes.
 
Parmi les personnes interviewées, bon nombre ont affirmé que les relations de leur organisme avec le gouvernement fédéral se sont améliorées dans le contexte de la pandémie. Cette évolution témoigne d’une compréhension naissante du rôle central joué par le secteur au sein du gouvernement. À nous maintenant de continuer d’explorer cette dynamique.

Le secteur souhaite une entité axée sur l’équité, les politiques et les relations

Alors, quelles attentes le secteur des OBNL a-t-il envers une éventuelle place au gouvernement? D’après ce que nous avons entendu, elle devra surtout faire preuve d’accessibilité et d’équité. Tous les organismes doivent y avoir accès, quels que soient leurs taille, sous-secteur, composition ou structure organisationnelle (OBNL, organisme de bienfaisance, organisme communautaire sans personnalité morale). Une entité responsable du secteur au sein du gouvernement doit offrir la même valeur aux petits organismes et aux organismes communautaires ou bénévoles qu’aux grands organismes nationaux.

Nous avons constaté un consensus généralisé pour faire des politiques publiques une priorité de l’entité. Cette dernière devrait élaborer des politiques favorables relatives au financement, à la main-d’œuvre du secteur et aux activités d’entrepreneuriat social, entre autres questions. Anita Khanna, directrice nationale, Politiques publiques et relations gouvernementales de Centraide United Way Canada, a souligné que le secteur a besoin d’une entité qui, en partenariat avec Statistique Canada, fournit des données en plus grande quantité et de meilleure qualité sur le secteur. Avec ces données, l’entité sera en mesure de sensibiliser l’ensemble du gouvernement aux contributions vitales, à la valeur et au fonctionnement des organismes au pays. De plus, ces données soutiendraient l’élaboration de politiques fondées favorables à la capacité des organismes de servir leurs communautés.
 
Qui plus est, les personnes interviewées ont exprimé le souhait de voir l’entité responsable jouer un rôle central dans la création de liens et de relations entre les organismes à la recherche de soutien et d’autres entités fédérales. On pense notamment au ministère des Finances, à Affaires mondiales Canada, au Secrétariat du Conseil du Trésor, et à Emploi et Développement social Canada. Elles ont insisté sur le fait que l’entité devait ajouter de la valeur et faciliter les interactions, plutôt que de nuire aux relations avec le gouvernement ou de les complexifier.

Les préoccupations du secteur relatives à une entité responsable au sein du gouvernement : autorité, longévité et équité

Malgré l’appui important pour la création d’une place au gouvernement, les personnes interviewées ont aussi exprimé plusieurs préoccupations à son sujet.

Autorité
 
L’autorité d’une entité responsable du secteur au sein du gouvernement est revenue comme une préoccupation constante durant nos entrevues. Selon une personne, « tous les efforts pour créer une place au gouvernement pour le secteur seront quasiment vains si nous ne réussissons pas à lui donner l’autorité nécessaire pour réaliser son mandat. » Les gens sont las d’entendre des annonces qui ne sont suivies d’aucune action concrète. Ou ils craignent une entité qui, dans les faits, n’est que le résultat d’un changement d’image de mesures limitées existantes. Une place au gouvernement doit être dotée d’un mandat clair et agir concrètement pour le bénéfice et le renforcement du secteur des OBNL.

Longévité
 
Dans le même ordre d’idées, la longévité et la permanence sont deux attributs indispensables de l’entité pour qu’elle puisse réaliser son mandat. Autrement dit, les changements de gouvernement, remaniements ministériels et changements de priorités politiques ne doivent nuire ni à son existence, ni à sa mission ou à son autorité.

Équité
 
La question de l’équité sous-entendait la plupart de nos conversations, et plus particulièrement le besoin d’en faire un élément central de la structure et du mandat d’une éventuelle place au gouvernement. Dans ses efforts continus dans ce dossier, le secteur se devra de consulter, d’écouter et de prioriser les groupes en quête d’équité pour s’assurer que l’entité à devenir les servira adéquatement. Par exemple, pendant longtemps, les relations entre les organismes autochtones et le gouvernement fédéral étaient empreintes de racisme systémique et de discrimination. Par conséquent, certains d’entre eux expriment aujourd’hui des appréhensions raisonnables à l’idée d’une place au gouvernement. Leurs préoccupations rappellent l’importance pour le secteur d’aborder de manière critique l’intégration d’une grande diversité de perspectives et d’expériences. La question d’équité doit faire l’objet de considérations sérieuses à chaque étape de ce dossier.
 
Selon Michael Toye du Réseau canadien de DÉC, toute organisation basée sur des structures légales au passé colonial et discriminatoire est problématique. On pense notamment au statut d’organisme de bienfaisance enregistré auprès de l’Agence du revenu du Canada. Le secteur devrait plutôt centrer toute proposition de mandat pour une entité au gouvernement aux organisations à vocation sociale. Le secteur a besoin d’une entité au gouvernement avec des mécanismes qui favorisent l’inclusion, l’autonomisation et l’innovation, au lieu d’affermir des iniquités historiques et structurelles.
 
Pour sa part, Carelle Mang-Benza de Coopération Canada a souligné que l’accès équitable à l’entité responsable sera primordial pour éviter que ce soit toujours les mêmes organismes aux ressources et relations bien établies qui sont entendus.

Quelles sont les prochaines étapes?

Dans sa réponse au rapport du comité sénatorial du secteur de la bienfaisance en 2019, le gouvernement s’est dit favorable à la création d’une place au gouvernement pour le secteur. Durant nos entrevues, nous avons souvent entendu que pour saisir cette occasion, le secteur devra discuter sérieusement du rôle, de la structure et du mandat de l’entité à créer pour être fin prêt quand viendra le temps de proposer des solutions au gouvernement. Un plus grand engagement du secteur passe par la sensibilisation, pour ensuite discuter des questions clés et résoudre les préoccupations existantes en collaboration avec le secteur et nos partenaires au gouvernement. La collaboration nous permettra de parler d’une voix unie des principaux aspects d’une entité responsable. Car plus cette entité s’inspirera de perspectives et de préoccupations différentes, plus elle sera solide et produira des résultats bénéfiques.
 
Remarque : Pendant l’été 2023, l’équipe des politiques publiques d’Imagine Canada a réalisé des entrevues avec 15 organismes et spécialistes, en plus de recevoir des commentaires par courriel de 6 autres parties au sujet de la place au gouvernement. Nous continuerons à recueillir vos opinions et vous invitons à nous écrire à politiquespubliques@imaginecanada.ca si vous souhaitez nous faire part de votre réflexion.  

 

 

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